Nous abordons la deuxième partie de l'étude "Dévoilement, hypostase et Principe".
Le voile est un symbole qui opère une rupture, une séparation du monde des apparences permettant une projection imaginaire et un franchissement.
Il n’y a pas de voile qui ne couvre l’image d’une réalité augmentée assortie d’un plan ou d’une dimension supplémentaire. Définitivement la loge et le Temple maçonniques établissent par le dévoilement, le concept de la surplombance et de la reliance !
1/ Aspect Kabbalistique, la remontée de l’Arbre-Axe.
L’autre aspect du dévoilement c’est qu’il attire notre attention sur le caractère trompeur du monde des apparences (monde d’Assiah), non pas que le réel n’est pas, mais que notre vision profane n’englobe pas toute la profondeur du réel. L’initiation maçonnique, c’est l’apprentissage de la profondeur et de la verticalité du réel en-soi, permettant le dévoilement des autres niveaux de perception. En 1638, le poète George Anderson dans son poème The muses threnodie fait référence explicite au Mot de Maçon (Mason Word -le secret du métier) et au don de double vue (second sight) qui sera qualifié de rabbinique aux aspects kabbalistiques.
Ainsi dans la Kabbale, le monde de l’Action, ( Assiah ), est le monde physique et concret de l’agir matériel. C’est le monde de la matière constituée des éléments les plus grossiers qui voit devant lui 3 voiles successifs se dresser pour trois autres mondes plus élaborés et plus éclairés.
Ces 4 Mondes au total (d’Assiah,d’ Yetzirah, de Bria puis d’Atziluth), sont dans la géométrie sacrée de la loge, les plans superposés d’une remontée vers la Lumière. Les plans sont ici les dimensions subtiles de la Réalité née de la lumière ineffable, des étapes dans le processus selon lequel l’Esprit se libère petit à petit de sa Matière puis de sa Forme dans sa remontée ou dans sa réintégration vers Aïn Soph. Ainsi à partir du réel apparent du monde des actions, nous pouvons appréhender ou imaginer l’essence divine par le Triple lever de voile jusqu’a l’Ineffable complet. L’Inconnaissable dans la Kabbale (appelés Aïn, Aïn Soph, Aïn Soph Aur) se manifeste, d’un point de vue humain, par le trajet de la de la Sephirah Malkouth, jusqu’à la Sephirah Kether, du plan le plus inférieur et humain au plan le plus supérieur et divin. Nous avons 10 Sephirah conçues comme des vases receptacles, qui sont les dix manifestations de la Volonté de l’ineffable Lumière.
De ce point de vue le lever de voile en loge est une étape de la remontée vers la Lumière.
2/ le Verbe est la Volonté « lumineuse » dans le Monde matériel et humain de la Loge
Le schéma de la kabbale nous aide à percevoir la notion d’hypostase dans une loge, chacun restant libre d’interpréter ce qu’est la lumière chez l’homme et dans l’image archétypale du Temple.
Pour comprendre ce que signifie le voile qui recouvre les éléments de langage du tableau de loge, il faut commencer par définir les lumières d’ordre comme des hypostases du Verbe divin. Ainsi, le voile, la vison, l’image, la lumière et le verbe sont liés dans une même relation élévatrice.
En effet, le Lumière et le Verbe divin étant inatteignables, l’homme n’en perçoit que la fraction rendue intelligible. Nous considérons que le dévoilement est par sa nature propre, synonyme de découverte du lien entre le visible et l’invisible, mais aussi entre l’apparent et non-apparent. Ce que cache le voile, c’est ce lien.
Nous avons vu en première partie que le stimulus sensoriel, la perception centrée, formée et figurée, la cognition suivant les différents modes, adaptent la lumière Principe aux termes d’un réel perceptible : ici Sagesse, Beauté, Force et tableau de loge sont des dérivées qualitatives et quantitatives de la lumière principielle. Les 3 lumières d’ordre, le voile et le tableau s’assimilent à des hypostases qui matérialisent l’invisible ou l’inaccessible. L’ensemble constitue la mise en image d’un dérivé principiel dans la matérialité.
La Lumière divine deviendrait indirectement « visible » pour certains, suggérée pour d’autres. C’est une volonté qui s’affiche dans le monde du symbole et du sacré qu’est le Loge. L’image dérivée appelée hypostase devient alors « vision », une réalité reliée à un plus haut
Nous savons que Sagesse Force et Beauté est un ternaire qualitatif accessible à la compréhension humaine. Il permet au binaire quantitatif et qualitatif typiquement matériel de remonter vers l’unité primordiale. Les trois qualités de la Lumière (SBF) sont projetées sur le plan de la loge, composé d’un pavé mosaïque d’apparence binaire. À ces fractions lumineuses correspond le trois issu de l’unité. Grâce au modèle du « Temple de la Lumière » auquel se réfère notre représentation mentale, le réel perceptible, peut être reliée au Principe lumineux unitaire.
À l’hypostase objective, avec mise en scène « in situe » correspond une hypostase mentale « in abstracto » (représentation en soi du motif), grâce au contexte du dévoilement notamment. Ainsi le dévoilement est double comme la Lumière : extérieur à soi et en-soi ! C’est un mécanisme fondamental qui permet de mieux comprendre que la vision de l’unité passe par un alignement harmonieux de plans intérieurs et extérieurs.
À partir de ce constat à la fois symbolique, psychique et cognitif, nous devons toujours tenir compte de l’objet observé et de la représentation mentale de l’observateur : les deux images produites, in situe et à l’intérieur de soi, sont hypostatiques d’une image « originelle », « principielle », « unitaire » ou « divine » et dans tous les cas analogique, car « symbolique ». Ainsi, si l’hypostase à lieu dans notre réel visible, elle rejoint le grand schéma de la correspondance hermétique entre le haut inatteignable et le bas visible, le troisième terme « oublié » étant l’homme qui observe et ressent le réel visible et invisible à sa propre mesure.
L’initié doit reconnaître les clefs qui permettent le passage du Principe au Réel dans le sens descendant, et du Réel à l’Essence dans le sens montant. Les clefs adaptatives d’un plan à l’autre sont aussi des clefs de lectures universelles. Ce sont aux modèles schématiques fondamentaux auxquels que se réfère la représentation mentale analogique : si le tableau de loge triplement éclairé est une clef de lecture de la relation Terre-Ciel, alors l’allumage de Sagesse, Force et Beauté sera sous-jacent de la lumière principielle. Ainsi, ce qui sera dévoilé et illuminé par les lumières d’ordre sera d’un ordre inférieur tout comme la Shekinah, la présence au cœur du tabernacle est une sous-production d’un Divin inatteignable.
Il reste toujours une trace de la « présence initiale » dans une production hypostatique.
Le dévoilement fait donc apparaître une reliance entre les différents niveaux (au moins 3 plus l’observateur dans son état). Le niveau dans lequel nous sommes agissants, appelé niveau « réel », serait le reflet d’un niveau supérieur ontologique conforme à la tradition. Ce « réel » fait apparaître au surplus ce fameux niveau intérieur à l’homme, où se déroule la représentation mentale du modèle suggéré. Le Réel serait le produit d’une relation triangulaire hypostatique entre le haut et le bas d’une part, entre le réel visible et la représentation mentale élargie d’autre part et enfin entre la représentation mentale et la source de lumière surplombante et inatteignable. Au centre de cette triangulation « haut et bas - représentation mentale d’un visible élargi - source inatteignable » est la « vision ».
Le privilège de l’initié est d’être par son apprentissage des signes et par son intuition (langage du cœur), capable de reconnaître schéma directeur suggéré par l’hypostase. C’est l’image suggérée qui inspire et nourrit notre système cognitif et notre « êtreté ». Le dévoilement de l’image schématique qui relie à plus haut, n’aurait pas de sens ni d’essence sans acteurs ni observateurs désirant la reliance. L’observateur qui désire une transcendance n’a d’autre choix que d’être acteur d’un rite qui permet l’intériorisation. C’est la voie cardiaque.
Ce désir de reliance marqué par la lumière, fera des FF et SS, les acteurs et les lecteurs de l’invisible, ou plus simplement des médiateurs entre la terre et le ciel. C’est ainsi que s’établit une relation triangulaire entre le motif central réel (tableau de loge et Loge), le motif représenté au centre de soi (temple intérieur) et l’origine axiale céleste et sa finalité symbolique (temple céleste). Ramenée a d’une dimension psychique la loge permet de mettre en évidence par le symbolisme constructif, la conscience humaine relative à soi et aux autres et son étendue totalisante. Cette relation triangulaire nous la retrouverons dans les différents sens attribués aux signes tels que et lettres d’un alphabet sacré. L’interprétation à plusieurs niveaux correspond à notre désir d’ascension ou de remontée vers un paradis perdu, propension naturelle chez l’homo erectus puis de l’homo sapiens d’imaginer une transmission originelle, une voie élévatrice, une connaissance donnant accès à la clef de tous les mystères.
3/ Mise en place et mise en forme de la source lumineuse dans le réel, dans la loge et en-soi.
Le Soleil pas plus que l’Étoile ne sont atteignables. Nous n’en recevons que les rayons qui éclairent notre pensée. Point d’hypostase sans source lumineuse.
L’hypostase est une représentation phénoménale rayonnante du divin surplombant ou du Principe non directement accessible. L’hypostase est une image ou un objet dans un niveau inférieur à celui d’où elle est censée provenir. C’est la notion de sous-jacence liée à la Verticalisation symbolique chez l’homme que nous décrirons. Sachant que la Verticalisation symbolique reste associée au désir de reliance. (Voir le redressement de la pierre « Bethel » par Jacob à l’issue d’un songe exprimant ce désir de reliance)
Symboliquement, le verbe créateur et animateur arrive au sein de l’enceinte consacrée de la loge pour illuminer notre conscience et notre relation à nous-mêmes, à l’autre et au monde, mais aussi à l’origine commune des ces trois cercles. La lumière enfin installée au centre de la loge, chacun peut s’y abreuver, en percevant le sens, et surtout l’essence de la Sagesse, de l’Harmonie et de la Force. C’est donc ces trois hypostases de la lumière divine qui vont éclairer et donner un sens corrélé au symbolisme des bâtisseurs. Leurs outils et instruments présents sur le tableau de loge seront agissants dans la lumière. Retenons que les outils et instruments du tableau de loge sont plus qu’opératifs, ils sont opérants. Ils opèrent en nous dès lors que les lisons en regard du modèle de temple à bâtir qui sera le « temple de la lumière ».(voir supra).
L’opération serait la construction en soi du temple « réceptacle » de la lumière.
Au plan humain « l’effet lumière » se traduit par la réalisation de soi en sagesse, harmonie et force ; sur un plan divin l’effet produit sur le plan humain devient cause : la lumière serait d’un point de vue humain, une pensée divine (sagesse), volonté divine (harmonie) et action divine (force) qui « opère » (effet) la construction d’un temple ici bas (le réel) afin de refléter la lumière d’en haut et en soi (double reflet).
Ainsi la cause, l’effet dans un plus bas et le reflet sont liés par l’homme et en lui. Donc le point de vue humain reste une association entre ce qui est réellement vu et la sous-jascence d’un modèle archétypal porté par le désir.
Toute « opération » hypostatique aboutirait chez l’homme à une double réalisation extérieure et intérieure : ici la construction d’un temple dédié à la lumière serait l’effet « monumental » sur terre et en chacun des bâtisseurs cela se traduirait par la construction d’un temple intérieur, authentique réalisation de soi. Bien entendu les principes de construction et les proportions restent les mêmes en soi, sur terre et dans le modèle originel, car l’homme serait à l’image de Dieu…
Les trois lumières d’ordre verticalisent le tableau de loge. Le phénomène perçu dans l’ordre humain (l’objet tableau éclairé en soi) peut être relié à son essence invisible, à savoir l’origine ontologique de la lumière. Sagesse Force et Beauté ordonneraient le niveau cognitif humain en fonction d’un modèle relevant d’un état supérieur que nous imaginons sans le voir vraiment. Ce passage du phénomène constaté sur un plan horizontal, à l’intelligible d’un modèle vertical, est de même nature en matière éthique que le passage du savoir-faire de l’artisan au savoir-être du franc-maçon. C’est par exemple le passage de la taille de la pierre brute à la pierre taillée et placée dans une œuvre de lumière. Grâce au dévoilement hypostatique, le savoir devient connaissance par Verticalisation de l’intellect. La Verticalisation de l’intellect implique l’abandon du registre logique pour déboucher dans le registre analogique, l’abandon du sens pour atteindre l’essence.
Notons enfin, pour clarifier l’intérêt du voile, que le tableau de loge est une table de projection, table à tracer, table d’élévation du plan qui par dévoilement reçoit un reflet lumineux issu d'un circuit triangulaire descendant et pénétrant. Nous retrouvons notre schéma triangulaire, mais cette fois en terme de réceptacle-dépôt :
a/ du ciel vers la loge-réceptacle centrée sur son tableau de loge,
b/ de la loge vers l’homme-réceptacle,
c/ de l’homme vers le franc-maçon « connaissant » (l’initié) qui à reçu la transmission (le dépôt traditionnel) des éléments de langage, les clefs pour lire le tableau et connaît l’importance de la lumière céleste.
Inutile de préciser que le fameux réceptacle n’est autre que la coupe ou le Graal figuré sur la table à trois pieds du Bateleur…Premier arcane du Tarot.
Le jeu de la sous-jacence hypostatique met en évidence la superposition des images et des temples Ceci n’est rien d’autre qu’un emboîtement des images ou schèmes selon un isomorphisme axial dont l’illustration la plus pertinente figure dans la représentation que l’on fait en soi de la Jérusalem terrestre et de la Jérusalem céleste. L’image du temple dans ses trois états (céleste, terrestre, et intérieur) illustre cet emboîtement. Ainsi par cet emboîtement structurant, à une imagination métaphysique de la lumière réponds une imagination microcosmique de la conscience. Le temple céleste de l’infini diurne et le cabinet de réflexion de l’enfermement nocturne se répondent et bornent la réalité profonde de l’initié comme du mystique.
Nous pouvons conclure que le procédé de l’hypostase en loge est un médium lumineux associé à la vision et à la connaissance.
En compléments du réceptacle médiumnique représenté par le tableau de loge et les 3 temples recevant la lumière-conscience, nous devons étudier ce qui s’apparente au denier cyclique et au bâton axial du Bateleur.
4/ le cortège lumineux de la Tradition et dimension polysémique.
L’hypostase naît d’une mise en œuvre ternaire, sur trois plans plus celui de l’observateur. L’observateur par sa présence influence le réel. C’est un phénomène à prendre en compte lorsque l’on parle de l’effet relatif de la perception ou de réalité perçue. Pour l’homme il n’y a pas d’autre réalité que la réalité perçue. L’initiation consiste en l’apprentissage des différents niveaux de perception. Dans l’ordre traditionnel, il faut trois officiants pour dessiner la perception totale. Dans les tarots on utilise divers symboles pour les caractériser : outre la coupe réceptacle de la représentation mentale, nous avons le denier cyclique de la lumière dans la matière et le bâton axial de la reliance au ciel et enfin l’épée représentant le verbe
L’hypostase liée au dévoilement serait donc l’aboutissement d’une mise en scène de l’entrée de la lumière en loge. Celle-ci entre en cortège par la porte d’Occident pour prendre siège à l’Orient, puis de l’Orient elle redescendra au centre du plan dans le Hékal sur un lieu de projection appelé tableau de loge et carré long. Venue des parvis, la lumière est portée par le frère terrible, suivi du Vénérable Maître et du Maître des Cérémonies.
Ce cortège à 3 nous rappelle les Rois Mages de la tradition chrétienne, où chaque couronné est porteur d’une offrande hypostatique de la lumière incarnée (l’or du roi est celui de l’étoile, l’encens du prêtre est le symbole de l’invocation divine, le parfum de la myrrhe celui de l’embaumement et de la vie après la mort, il est aussi le parfum de la prophétie et de la renaissance) et chacune des offrandes va rectifier la matière du nouveau-né et confirme l’état cristallin de Jésus (la pierre philosophale alchimiquement pure) et donc la reliance du nouveau-né à l’étoile « très lumineuse » (quintessence) qui leur servi de guide. Ainsi les trois mages honorent par des offrandes le réceptacle humain de la lumière d’une l’étoile lumineuse. Le but du Grand Œuvre est le mariage du soufre (pôle masculin) et du mercure (pôle féminin) par l'action du sel ; principe neutre, le troisième qui scelle les deux autres. Nous y reviendrons plus loin. Notons toutefois que ces trois offrandes qui célèbrent et triangulent l’incarnation du principe en l’homme, sont synthétisées en loge par trois lumières d’ordre qui triangulent à leur tour le principe qui descend au milieu du Plan humain, au milieu du tableau de loge, au milieu du temple à bâtir.
Au plan psychique ce schéma nous donne une source lumineuse qui est l’étoile-principe, ou l’exemplarité ou la Bonne Étoile, en relation avec un réceptacle ou table de projection pour la lumière que serait la crèche, écrin du nouveau-né. La figuration de l’illumination de la crèche par les offrandes est à nouveau une triangulation dédoublée : les rois mages sont en triangle autour du nouveau-né, incarnation de la lumière dans un triangle montant, Ce triangle qui encense la relation terre ciel dans ce nouveau-né, est inscrit dans un carré typiquement terrestre composé de la Vierge assimilée à la crèche et Joseph assimilé à l’archétype de l’homme, l’âne porteur de reliques sur terre reconnaît son Maître alors que le bœuf cornu par la reliance au ciel reconnaît son étable. Les deux souffles vitaux de l’âne et du bœuf sont chargés de réchauffer le nouveau-né dans ce monde, pendant que le charpentier couvreur et la vierge réceptacle protègent et font un écrin, une loge à la lumière incarnée.
Cette crèche « loggia » serait le lieu de naissance de la nouvelle conscience de l’Homme « éclairé » (conscience de soi des autres et du monde), ou le Grall-chaudron du chevalier, ou l’athanor des alchimistes ou la table du bateleur, ou encore le tableau de loge triplement éclairé. Les trois officiants sont porteurs des insignes structurants de la conscience éclairée : « état corporel » sous la lumière, « état d’âme » en relation à plus haut c’est-à-dire en « élévation » vers la nature divine de l’homme et enfin « état d’esprit » donnant une vision « inspirée »par la relation axiale. Cette conscience éclairée semble une fois de plus marquée par le désir d’alignement des trois états constitutifs de l’être.
Les trois Rois, porteurs d’une couronne symbolisant le céleste, sont une triangulation. Ils se déplacent sur le plan terrestre et viennent se mettre à l’aplomb de l’alignement axial qui part de l’étoile-lumière et descend dans le réceptacle-crèche. La crèche est le plan de projection de l’étoile.
En conclusion nous retrouvons le plan de projection avec ses quatre angles (la vierge, le charpentier couvreur, le bœuf et l’âne), une triangulation hypostatique « royale » et un chemin axial d’élévation vers la source marquant la reliance à l’étoile fixe et immuable. On retiendra que les trois couronnes et leurs attribus réunies en un point réceptacle situé sous l'étoile sont hypostatiques, elles révèlent ce qui sera considéré comme une "épiphanie".
Le franc-maçon est loin de l'épiphanie, mais il conserve la pratique hypostatique traditionnelle de la célébration de la lumière quelque soit le rite.
5/ Le cortège lumineux en loge
En loge l’illumination est aussi un cheminement intérieur, un sentier lumineux.
Reprenons le cheminement en loge : la lumière entre en loge et suit le chemin héliaque et dextrorsum du lever au coucher du soleil. Il s’agit d’aller à la rencontre de la lumière naissante de l’Orient, puis de répandre celle-ci sur le plan de la loge en trois fractions qui établissent par ses effets perceptibles à l’homme, une Verticalisation.
Nous retrouvons ce cortège lumineux dans la loge, chacun à un rôle bien défini dans le plan : au REP, le Maître de Cérémonie veille à ce qu’il n’y ait aucun obstacle devant le porteur de la lumière : le porteur ne doit pas chuter dans son parcours vers l’Orient[1]. Le processus d’illumination de la loge est le suivant : 1/ Le porteur de lumière qui est le Frère Terrible porte aussi une épée synonyme de verbe humain, à main droite, et le chandelier à trois branches à main gauche, 2/ le Vénérable Maître entre au signe de fidélité la main droite posée en creux sur le cœur réceptacle, une fois à l’Orient il sera porteur du maillet sur le cœur signe du pouvoir temporel et de l’épée flamboyante symbole de l’autorité spirituelle déléguée, soit le verbe divin ou sel alchimique, 3/ et enfin le Maître des Cérémonies porteur de la canne qui est un axe de jonction entre la terre et le ciel, sera chargé d’animer le monde manifesté (carré long-pavé mosaïque) par les trois lumières d’ordre. Ces trois lumières d’ordres sont réputées purifiées, car venues de l’Orient et donc dégagées de leurs « terrestreités ». Le Maître des Cérémonies va mettre dans l’athanor central les trois principes : sel, soufre mercure et de « luter » le tout puis de dévoiler le premier résultat qui est ce fameux tableau de loge. Ce tableau n’est qu’un stade intermédiaire du Grand Œuvre qui consiste à conjoindre l’esprit et la matière dans ses proportions originelles. Il y aura trois tableaux de loge correspondant aux trois œuvres et aux trois grades.
La loge-athanor répond à l’injonction Paracelsienne : « De l'unité, tirez le nombre ternaire et ramenez le ternaire à l'unité ». (Nous reviendrons sur l’aspect alchimique en partie III)
Nous pouvons conclure que le cortège lumineux est un voyage cycliquement renouvelé et célébré dans les sociétés traditionnelles (fêtes des deux Saint-Jeans). Dans l’arcane du Bateleur, la loi du cycle perçue sur terre est représentée par le denier-sicle. Face au réceptacle et au cycle est présent l’axe. L’axe permet de faire descendre la lumière parmi les tribus et au centre dans le foyer. L’axe comme l’échelle autorisent une reliance et un voyage mental de réintégration dans la lumière des origines.
6/ L’animation ternaire du centre tribal pourquoi faire ?
La lumière fait naître le monde des formes et la pensée. D’un point de vue anthropologique ce sont trois acteurs qui interviennent pour célébrer une ontogenèse.
Le rituel d’animation ternaire est conforme à la tradition qui veut que depuis la nuit des temps le feu-lumière source de vie et de reliance à plus haut soit protégée et rituellement installé au centre de l’enceinte tribale ou du lieu d’invocation. C’est le feu central qui réunit l’assemblée. Les rituels de consécration les temples et des loges suivent ce schéma général d’animation du centre relié à plus haut. Trois personnages interviennent : le vieux sage qui invoque le Très-Haut, le mage celui qui fait apparaître les images ici-bas, le gardien qui veille sur la flamme et vérifie le rang et la place de chacun dans les cercles concentriques.
Nous retrouverons ces trois personnages qui vont présider à l’allumage des lumières d’ordre qui sont synonymes des lumières d’ordonnancement du chaos dans le Hékal ; ce qui est mimé en loge, c’est tout le processus de création et de manifestation de l’univers, mais aussi, et surtout, le processus éclairement de la conscience qui fait du Temple à la fois une image de l’homme et du divin.
Le niveau de conscience n’est pas uniquement individuel il répond à des représentations ancestrales liées à l’évolution humaine. Cette organisation lumineuse porte l’organisation collective du divin au centre de la tribu par trois officiants. Par mimétisme ces trois officiants incarneront au niveau sociétal les trois voies initiatiques traditionnelles (sacerdotale, chevaleresque et artisanale) qui co-participent au dévoilement hypostatique d’un même sommet.
7/ Instrumentalisation de la lumière en loge : de la lumière élémentaire à la lumière principe.
La concentration des actes et des pensées est nécessaire pour mettre en œuvre la lumière dans un espace clôt en un point donné. Des quatre éléments nous allons passer aux trois principes incarnés par trois lumières d’ordre et trois officiants (au REP). Les trois officiants ont déjà subi avec succès les épreuves élémentaires il ne leur reste plus qu’a introduire les trois lumières principes au milieu des éléments. Le but est donc de passer d’un stade de recomposition élémentaire (initiation) au stade principiel représenté ici bas par triple hypostase.
Du système tribal nous avons hérité d’une instrumentation symbolique de l’acte lumineux.
On retrouve la classification instrumentale de la lumière dans les tarots et dans la lame du Bateleur qui correspond symbole pour symbole a l’entrée du cortège lumineux en loge. Au risque de nous répéter (voir paragraphe 5), nous avons la lame du Bateleur qui synthétise l’ensemble du mécanisme hypostatique sur une table de projection.
Le Bateleur représente la cause première, la présence d’esprit, la source et sa manifestation « imagée » par un véritable mage :
1/ dans le réceptacle de la loge représentée par le vase-coupe (élément eau),
2/ nous avons le denier-sicle , expression terrestre (élément terre), représenté par le pavé mosaïque qui supporte le tableau de loge permettant la construction du temple,
3/ le bâton (élément feu) symbolise la relation terre-ciel et l’ordonnancement de la lumière,
4/ l’épée (élément air) remise au Fère Terrible symbolise le verbe dans le bas alors que l’épée flamboyante exprime le Verbe dans le haut, la lumière installée au Debhir.
L’épée droite (verbe d’en bas) entre les mains du gardien du seuil va refermer la porte du temple afin que l’espace devienne « hermétiquement » clôt aux influences profanes. La canne du MDC va assurer la liaison entre la terre et le ciel, et enfin le maillet exprimera la force la volonté agissante nécessaire pour répandre la lumière dans l’espace réceptacle de la loge. Mais la véritable source de cet ordonnancement éclairé du monde et de la conscience humaine vient du ciel : l’épée flamboyante (l’autorité spirituelle) se relie à la lumière principielle et diffuse l’influx spirituel venu de l’Orient. Elle transmet par le Vénérable la pensée originelle, celle de la création du monde, la lumière incréée et la puissance infinie qui préside au « fiat lux ». Cette mécanique de diffusion de la lumière descend de l’Orient vers le centre du carré long. Le carré long, véritable « table de projection », « fond du ballon » de l’athanor, symbolise le cœur de manifestation du monde et l’émergence de la conscience, du langage et de la représentation mentale chez l’homme.
On voit le schéma suivant se dessiner : l’unité d’origine devient le Un du VM qui donne instruction au Maître Des Cérémonies qui tient le bâton lumineux et au Frère Terrible qui tient l’épée verbe (le deux) l’ordre d’ordonner en ternaire hypostatique (le 3 et les trois principes alchimiques) l’illumination du tableau de loge (le 4 des quatre angles et quatre éléments). Le Tableau de loge est un quaternaire matériel ou élémentaire, illuminé par un ternaire principiel, lui-même hypostase de l’Unité. Ici se situe le schéma bien connu de la Tétraktys pythagoricienne 1+2+3+4=10.
Mais ce n’est pas tout, nous conclurons que ce qui est un modèle, une image et une hypostase doit rayonner à son tour.
8/le dédoublement dans l’état inférieur, passage du Temple de lumière au Temple de l’homme
Le Hekal est dans un plan inférieur à celui du Debhir, donc le Vénérable fait diffuser la lumière dans un plan inférieur par les lumières d’ordonnancement.
C’est à cette source ordonnatrice secondaire que le 1er et 2nd Surveillant vont à leur tour prendre la lumière nécessaire à l’éclairement de leurs colonnes. Le foyer central va se rependre en chacun de nous. En effet chaque franc-maçon participe « activement » à l’illumination et à la « formation » de la loge. Il est évident que l’éclairement des colonnes relie chaque maçon présent au Vénérable via son Surveillant et au carré long et à l’image éclairée qui s’y trouve. À ce stade les deux surveillants sont les représentants, des médiateurs de l’ordonnancement lumineux à l’échelle humaine. Ils se servent de l’image éclairée du tableau de loge pour la démultiplier et la répandre. Ils sont chargés par leur transmission d’établir le langage symbolique et constructif de l’humanité. Ce langage sera celui des bâtisseurs de lumière. Donc nous pouvons dire que l’ensemble du Hékal doit son organisation et son ordonnancement à l’allumage des lumières d’ordre qui illuminent son centre « dévoilé ». On notera que cet ordonnancement n’est descriptible que par la lecture du tableau. Le tableau donne un sens à la lumière en fonction d’un modèle et d’un plan dévoilé. Ce sera celui du Temple-lumière. (voir supra)
Il y a bien ici une relation entre ce qui est en haut et ce qui est en bas, entre un niveau supérieur inintelligible à l’homme avec un dieu invisible, innommable et non situé, et un niveau inférieur plus accessible à l’homme, avec des « signes » et des symboles lisibles, éclairés par les 3 lumières hypostatiques. Nous avons vu que les lumières hypostatiques du divin deviennent assez facilement des lumières « principe » sur un plan alchimique, ou des qualités universelles sur un plan éthique et psychique : Sagesse, Beauté, Force.
Le Un invisible se dédouble dans la matérialité manifestée binaire et devient trois à l’échelle de la perception spirituelle de l’homme : le pavé mosaïque « éclairé » dans son ensemble (le noir et le blanc ainsi éclairé par trois lumières) nous dévoile une image icône qui se veut « essentielle ». Le ternaire étant une déclinaison triangulaire du Un originel, ce ternaire permet l’élaboration imagée en l’homme d’éléments symboliques qui permettent de créer la relation au principe. Ainsi, tailler sa pierre puis construire le Temple permet de construire notre relation au divin en nous rectifiant. Une mise en scène graduelle est nécessaire pour signifier en essence le principe originel qui descend dans la matière. Le voile est levé pour que le temple devienne réceptacle et le bandeau est levé pour que l’homme discerne et ressente en lui. La mise en scène hypostatique passe par un double lever du voile symbolique pour mieux signifier le mécanisme de la représentation mentale.
Il faut avoir vu pour la première fois, la lumière à l’Orient pour comprendre ce que signifie la découverte hypostatique au centre du Hékal, car le voile pour l’entrée du temple est l’équivalent du bandeau pour l’apprenti en regard du Principe -Lumière. Dévoiler revient à ôter ce qui couvre la vue discernante. C’est un dessillement des yeux.
Le dévoilement est précédé d’une mise en condition ritualisée des participants aux travaux de loge. Outre l’abandon des métaux et des émotions profanes, cette mise en condition en appelle aux vertus « opérantes » de la lumière-esprit en chaque acteur de la loge : le Vénérable dit successivement : « - Que la Sagesse préside à nos travaux ». –« Que la Beauté les orne ». – « Que la Force les achève ». L’ouverture s’adresse aux travaux dans le laboratoire de la loge, mais aussi au travail en soi.
Avant la fermeture des travaux, on procède au revoilement du tableau après l’extinction des lumières d’ordre. C’est dans une triple invocation que chacun intègre les vertus liées au principe lumineux : « - Que Ta Sagesse, Dieu Tout-puissant, soit toujours en nos esprits. », « - Que la Beauté les inspire en toutes nos actions. », « - Que la Force appuie nos efforts vers le Bien ». La fermeture s’adresse aux travaux dans le monde par l’homme éclairé par la lumière en soi. C’est une approche éthique de l’incarnation lumineuse. Du laboratoire de la loge, nous passons au labeur en soi.
Si le tableau de loge dévoilé est un reflet d’une lumière spirituelle « opérante », ou d’un principe ordonnateur, alors la lumière incarnée du franc-maçon est le moteur de l’être spirituel qui agit dans le formel.
Le tableau de loge dévoilé révèle une réalité à plusieurs niveaux interactifs.
9/ le Langage et sa clef et sa structure « essentielle ».
Le langage de la lumière en loge est une orthopraxie lumineuse, c'est-à-dire une mise en pratique d’une verticalité descendante dans le plan. L’initiation est une expérience lumineuse du réel. L’orthodoxie est aussi présente dans le rite maçonnique par la recherche de la verbalisation originelle du nom divin. Cette doxa est inachevée, car portée par le symbole de la parole perdue. Cette distance entre le verbe humain et divin est représentée par l’épée droite du Hékal et l’épée flamboyante du Debhir. Néanmoins nous voyons à quel point le verbe et la lumière sont liés dans la recherche des origines.
Il convient de distinguer le sens de l'essence par un troisième élément qui est porté par l'hypostase: là est le secret géométrique de l'hypostase. A partir de deux éléments connus je détermine le troisième perdu. Ainsi en étudiant la représentation hypostatique dans un plan inférieur nous pouvons reformer l'essence de la parole perdue dans un plan supérieur. La parole substituée n'est qu'hypostase de la parole perdue que nous ne retrouverons pas par le sens, définitivement perdu mais par l'essence toujours accessible. L'essence s'est réfugiée à la fois dans le mot substitué dans l'ordre inférieur mais aussi par le rite inchangé qui mime encore les deux notions initiales "sens et essence".
Donc ce qui est perdu est perdu en "sens" mais pas en essence!!! C'est ce que l'on découvre en travaillant sur les substitutifs hypostatiques, c'est logique et mathématique.
Le tableau de loge éclairé établit une corrélation « objective » entre les éléments de langage de notre environnement maçonnique. En effet, les objets-symboles s’animent et se corrèlent entre eux pour former une combinatoire de langage dans le registre des bâtisseurs du temple. Cette combinatoire ne fait pas que donner du « sens », elle fait apparaître une dimension « essentielle » par la voie symbolique. Les symboles se substituent aux objets représentés. Cette dimension en « essence » est une reliance de chaque outil, instrument et objet d’architecture, au céleste. Cette reliance est inhérente au modèle du temple « maison du divin » sur terre. C’est donc une spiritualité « construite » qui se dégage naturellement de cette découverte.
L’acte de tailler sa propre pierre aura pour but d’éclairer le maçon sur lui-même et sur sa place dans le temple.
Enfin, avec l’orthopraxie et l’hypostase nous pouvons maintenant aborder la recherche d’une clef de lecture qui respecte l’intention rituelique et le modèle du temple de la lumière. Cette intention rituelique est révélée par une prière qui fait partie du rituel du XVIIIème Siècle du REP : « A la Gloire du Dieu Tout Puissant, Grand Architecte de l’Univers, au nom et sous les auspices de la Grande Loge Symbolique travaillant au Rite Écossais Primitif, en vertu des Anciens Devoirs et des Pouvoirs qui me furent conférés en fonction de ma charge, je déclare ouverts les Travaux en Loge d’Apprentis ». L'ora annonce le labora en suivant la même structure essentielle.
L'ora descendant peut être lu en remontant : « les travaux en loge sont un Devoir et une charge qui nous relient à la Gloire et à la Puissance ». On remarquera, au Rite Écossais Primitif, que chaque lumière d’ordre se relie au tableau de loge par une représentation stylistique et normative, par exemple : ionique pour sagesse, dorique pour force et corinthienne pour beauté, avec un instrument de mesure au pied de chacune : équerre, fil à plomb, perpendiculaire. C’est ici que se situe la clef.
Cette association des colonnettes axiales, aux trois styles et aux trois instruments d’architecture est l’objet même du dévoilement. Le dévoilement précise la nature particulière des lumières d’ordre, leur style et leur inscription dans le réel « matériel » d’une manière « ordonnée » et géométrisée suivant l’équerre, la verticale et l’horizontale.
Il y a littéralement correspondance ou emboîtement du sens à donner à la lumière des origines venue d’en haut, jusqu'à son organisation figurée au tableau de loge. En dévoilant le tableau, on dévoile la clef de lecture du sacré donnant une possibilité de remontée vers la source.
Ainsi d’une lumière des origines nous débouchons dans la réalité concrète toujours reliée à la cause première qui ordonne le chaos suivant les trois axes et les six directions et un centre générateur. Cette découverte (ou ce dévoilement) met en exergue le lien de cause à effet entre la Lumière des origines et la lumière des hommes, celle de la réalité « perçue » de manière tridimensionnelle. Ce qui est dévoilé en une fois pour le tableau de loge, doit être entrepris pour chacun des objets symboles : par illumination de leur sens, ils deviennent symboles puis essence. Mais avant d’atteindre ces trois dimensions, chacun doit travailler dans le plan qui est le sien et dans son propre athanor.
Finalement ce qui est dévoilé ce sont les éléments de langage de la reliance à plus haut, à cette autorité surplombante ordonnatrice des sociétés humaines appelée GADLU en franc-maçonnerie. Nous restons ainsi dans l’objectivation de cette cause première, que l’on qualifie de puissance créatrice, ce « Dieu qui géométrise » que les hommes ont découvert en eux-mêmes il y bien longtemps, comme générateur d’une pensée créatrice universelle, d’une volonté qui se manifeste par une réalisation universelle et particulière.
L’essence du réel ne s’oppose pas à la substance, car nous avons le langage et donc la représentation mentale pour faire le lien. La Lumière devient trine et le Verbe devient Sagesse Force et Beauté. Le dévoilement permet de redécouvrir et surtout de réactiver le lien de l’esprit qui existe entre substance et essence, entre la terre et le ciel : c’est ainsi que l’on dévoile le double mécanisme secret de l’immanence et de la transcendance.
On trace à la craie la médiation de l’homme entre terre et ciel en prenant appui sur un modèle, un schéma directeur, une clef de lecture en trois dimensions. Ce schéma directeur nous apparaît par la corrélation de chaque lumière d’ordre avec les instruments associés du tableau de loge comme une croix tridimensionnelle : équerre, fil à plomb, niveaux, trois axes six directions, le point central les lignes et les plans.
Cette croix tridimensionnelle est l’expression du Principe manifesté, c’est aussi la structure de toutes les représentations symboliques majeures qui induisent une reliance entre le principe axial et le plan manifesté sur lequel nous travaillons.
Enfin nous pouvons vérifier que chaque signe tracé sur le tableau de loge, qu’il soit outil ou instrument, meuble ou astre, participe du symbolisme axial. La trace est un signe qui fait sens, mais qui une fois dévoilée et éclairée porte une dimension en essence appelée "présence" dans l'arbre des séphirot. La trace et le tracé dévoilés sont porteurs des résidus du principe.
10/ Vérité, Formes et transformation. De l’Ars à la Trans.
En découvrant un tableau de loge « illuminé », nous dévoilons symboliquement la vérité, la cause première de la vie et de la création. Le voile protège des regards profanes (littéralement l’état de celui qui n’a pas vu la lumière) le secret du langage maçonnique qui est cette combinatoire d’un langage reliant traditionnellement la terre au ciel. En effet tous les symboles maçonniques ont une relation avec le céleste.
Le dévoilement signifie que le réel est bien plus que l’apparence et qu’il faut en sagesse rechercher l’harmonie en soi, envers l’autre et au monde pour, avec détermination et force, progresser sur le chemin de la lumière, véritable dévoilement intérieur. Cette progression se verbalise et se modélise dans l’athanor de la loge. Le verbe associé à l’image, produisent une représentation mentale et un schème structurant s’installe au centre de nous-mêmes comme dans la loge.
La voie initiatique est une ascension prométhéenne qui commence par la découverte de ce qui se cache sous le voile des symboles. Le voile n’a de sens qu’en regard de son environnement symbolique et dans le plan dans lequel il se situe. Le voile est mis pour signifier que la combinatoire du langage symbolique et la représentation mentale, supposent pour être efficace, que le maçon « opère » ce lever de voile à l’intérieur de lui-même. Ce qui est alors visible et je dirais « modélisé », c’est une réalité plus profonde, celle qui débouche sur la conscience éclairée et donc sur la sensation de l’hypostase en soi. Cette hypostase lumineuse fait de la loge un athanor qui non seulement étend le domaine du réel, mais produit en plus une conscience globale éclairée par l’esprit. C’est notre pierre philosophale, notre chrysopée.
L’hypostase est le moyen, le support « humain » de la remontée en soi qui permet le passage de la perception des phénomènes à la vision, mais aussi le passage de la vision à la réalisation de l’opération alchimique. L’immanence, sommet de l’intériorité totalisante, fait alors écho à la transcendance, béance de l’infini. Le dévoilement est double, extérieur et intérieur, vertical et horizontal telle est sa mécanique « essentielle » et rayonnante du dévoilement au REP. C’est ainsi que la franc-maçonnerie conserve d’Art de l’image agissante sur le mental.
L’image reste ici une représentation du sacré, un miroir qui permet le changement de niveau de lecture d’un réel toujours plus profond qu’il n’y paraît. Ce changement de niveau de lecture est magique au sens de la production d’une image dévoilée dans un niveau de représentation axial ou latéral, c’est l’art :
- du transfert,
- de la transformation,
- de la transposition,
- de la transmutation, etc.
La réalité ne serait alors qu’une alchimie de l’esprit. Donc il n’y aurait d’initiation que de renaître dans un réel profond.
ER
[1] La notion de chute est synonyme de chute dans la matérialité. C’est une gnose bien présente dans l’hermétisme chrétien. Le franc-maçon tout en constatant le réel tente de s’élever vers des sphères supérieures. Sur la chute, voir la chute de l’ange porteur de lumière, appelé Satan ou Lucifer qui devient un ange déchu, dans les traditions chrétiennes ou juives. C’est un ange exilé ou banni du Paradis en punition de sa désobéissance ou rébellion contre Dieu