Sur quels ressorts archétypaux et sur quelles clefs symboliques fondatrices reposent les tableaux de loge des francs-maçons?
Si le mot Genèse veut dire « commencement » au sens créationniste pour le Monde et générationnel pour l’Homme, le mot initiation veut dire aussi « commencement » au sens d’un cheminement entrepris par l’apprenti ! C’est à partir de ce triple aspect du Commencement que nous tenterons un rapprochement entre les 3 premiers chapitres de la Genèse et la lecture du tableau de loge. Ce dernier illustre l’aboutissement du parcours élémentaire de l’Apprenti donnant à son travail sur la Pierre Brute la perspective d’une spiritualité construite en Loge et en soi.
Les rituels d’initiations et de consécration des loges mettent en œuvre des situations archétypales que l’on retrouve dans les mythes, les doxa religieuses et la psychologie des profondeurs. Les anthropologues nous disent que les mythes de la création du monde et de l’homme sont universels. Ils appartiennent à la Grande Tradition et la franc-maçonnerie traditionnelle ne pouvait que s’en faire écho jusque dans ses tableaux de loge.
Nous commencerons par cerner le cadre archétypal commun à la Genèse et à la méthode initiatique maçonnique (I), puis nous retrouverons dans le Tableau de loge de l’Apprenti les traits structurants du monde de la Genèse (II) , et enfin pour boucler notre tour d’horizon nous trouverons dans le rituel de l’apprenti les traces la chute d’un Adam dédoublé (Adam et Eve) dans la matière (III), et les moyens d’une remontée axiale (IV).
I - Les trois premiers chapitres de la Genèse recoupent trois archétypes structurants que l’on retrouve dans notre parcours vers le Tableau de Loge (TDL) :
LA "PAROLE" AUTOCREATRICE |
1/ La Genèse nous décrit la Création d’un macrocosme mettant en place une relation ontologique et lumineuse entre Terre et Ciel, le haut et le bas. L'Unique s'exprime par une parole autocréatrice, par dédoublement et par modelage. Réponse dans le parcours vers le TDL : On constate la présence des dispositifs par dédoublement: terrestre, solaro-terrestre et céleste (Pavé Mosaïque, Soleil, Lune, corde à nœuds). Ce dispositif est traversé d’un axe (le fil à plomb) associé au règne d’un Triangle doté d’un Œil[1] illuminant un plan terrestre . L'ensemble est doté d'une porte d’accès et de symboles axiaux (les 2 colonnes et la porte). L'ensemble forme la fameuse croix tridimensionnelle «axiale et orientée » des loges maçonniques et bâtis sacrés. Ce schème dynamique semble issu de cette Parole. (voir Schéma 1).
2/ La Genèse nous décrit la Création de l’homme et de la femme à partir d’un Adam Premier fait a l’image de son créateur. l'acte créateur est encore une Parole intérieure qui n'a pas a être entendue par quiconque. Il s'agit d'un dédoublement à partir de l'Unité, auquel s'ajoute une forme modelée: c'est l'apparition du langage des formes. L'Adam Premier nait de poussière et d’eau (glaise) recevant le souffle divin, vivant éternellement à l’Est de l’Eden, avec pour Centre l’Arbre de vie et l’Arbre de la connaissance. Réponse du parcours vers le TDL : Apparition de l’impétrant entre les deux arbres-colonnes à grenades, subissant les 4 épreuves élémentaires recomposant le type Humain comme un nouvel Adam fixé par l’illumination spirituelle finale et l’imago Mundi. Ce prototype de « l’Homme régénéré » par les 4 éléments, sera « créé, constitué et reçu Franc Maçon à perpétuité » par le VM, la main droite sur les 3 Grandes Lumières. Il travaillera à produire des formes parfaites. A ce stade il n'y a pas encore de dialogue.
DE LA PAROLE AUTOCREATRICE AU DIALOGUE NOSTALGIQUE |
3/ La Genèse décrit l’Adam androgyne subdivisé en Homme et Femme qui chute(nt) dans un Microcosme mental (CATABASE) : une matérialité faite d'un vêtement de peau, de labeur (celle du tailleur de pierre) et de finitude humaine et d'apparences. Dans leur chute ils conservent les traits édeniques de leur origine et se rêvent dans une Totalité fondatrice alors qu'il ne sont que microcosme. Ils sont mus par la nostalgie de l’Eden. Réponse du TDL : à la chute pour non respect d' l'Ordre, répond le labeur de toute une fraternité, ou chaque franc-maçon revêtu d'une peau d'agneau en guise de tablier, travaille la Pierre brute jusqu'à la perfection. C'est à l’aide d’outils et de plans que cette fraternité va construire un Temple « UNIVERSEL ».
Dans cette volonté de construction, la proportion de l'Homme se projette dans tous l'Univers. Cette action devient démiurgique : il s’agit de construire une demeure, un Temple pour la Lumière éternelle pour l’humanité et en soi. C'est une manière de retrouver le "Paradis perdu" par une remontée axiale de notre lumière intérieure (ANABASE) vers l'Unité première.
Ces trois archétypes trouvent leur finalité dans le désir de retour au Paradis perdu, le désir de retrouver la Parole perdue du Grand Architecte que les francs-maçons synthétisent par une marche vers la Lumière synonyme de Connaissance, de Vérité et de Sagesse. Malheureusement retrouver la Parole est une vraie difficulté depuis que l'homme s'adonne au dialogue avec le serpent. Désormais de la Parole en soi, on passe aux mots sont des signes difficiles à interpréter, le doute s'installe et le langage incomplet devient conflictuel. L'apparence prévaut sur l'essence. Le langage est temporel, la Parole intemporelle.
Pour servir ces 3 archétypes liés à la Parole auto créatrice, le TDL véritable « Imago Mundi », assemble une combinatoire de langages hermétiques et archétypaux. Y sont placés les moyens symboliques de la remontée à partir d’objets formant systèmes symboliques (17 objets au TDL du REAA vont former 4 systèmes servant la remontée axiale (voir le schéma 3 concernant les 4 miroirs anabatiques des TDL). On notera que LE SYMBOLISME AXIAL EST OMNIPRÉSENT DANS LE TDL par le fil à plomb qui le domine, l'aligne, le centre et l'essentialise.
Le Tableau comme la Loge, forment un miroir « hermétique » pour la connaissance de soi et du monde. En un mot le Tableau de loge indique une méthode mémorielle et intuitive pour atteindre « la vraie Lumière ». Le Tableau de Loge est donc le rébus, une synthèse décrivant une relation privilégiée entre Terre et Ciel, permettant une remontée vers la Vraie LUMIÈRE, elle-même synonyme de Parole perdue ou de Paradis perdu.
[1] Parfois l'Oeil est remplacé par le Nom divin ou par un Point ou un Iod point géométrique central de la manifestation. Le Iod est né de l'Aleph et du Beth. C'est l'enfant Roi né du Créateur et de la Vierge (Maison).
II / Traits structurants communs à la Genèse et au Tableau de loge -
Nous allons synthétiser chaque verset des deux premiers chapitres de la Genèse en langage symbolique maçonnique. Gen 1:1 à 2:3 commence avec la Création de l'Univers par Dieu en six jours, plus un Jour de repos c’est l’Heptaméron: Le divin crée par une Parole autoréalisatrice.
1er jour : « le premier jour, Dieu a créé la matière et la lumière à partir du chaos ». La séparation de la Lumière et des ténèbres est accomplie. C’est le début de l’ordonnancement du chaos cher au REAA et au REP. La Lumière du premier jour n’est pas celle des « astres ». La lumière et les ténèbres sont indépendantes des corps célestes : le Soleil, la Lune et les étoiles n’existent pas encore. Dieu est donc associé à la Lumière ontologique ESPRIT AUTOCREATEUR qui se distingue du chaos. Ce point est a rapprocher du prologue de Saint-Jean et du fiat lux.
Cette lumière ontologique se représente par un Triangle isocèle ou équilatéral centré d'un œil, ou d'un double triangle superposé inversé de type hexagramme. C'est l'aleph hébraïque, l'alpha de l'origine qui représente la puissance créatrice, cette lettre première va féconder la suite des autres lettres hébraïques, elle habite littéralement toutes les autres lettres. On comprend la raison de l'épellation des francs-maçons qui s'inscrit dans une suite remontante vers l'origine.
Schéma N°1
Le rituel maçonnique indique de la Lumière du Jour qui succède à la nuit, mais l’initiation introduit une lumière de nature spirituelle. Nous avons donc une Lumière ontologique éternelle marquée par les rayons du Triangle oriental de la Loge et une lumière matérielle cyclique et temporelle du 4-ème jour qui rythmera les heures de travail du maçon après la chute. La Lumière de l'initiation fait le lien dans un entre-deux lumineux par le truchement de miroirs symboliques.
2ème jour : Dieu sépare les eaux du bas de celles du haut. Le haut et le bas sont marqués en loge par le Zénith et le Nadir et le fil à plomb indiquant la verticalité.
Il sépare les composantes substantielles du vide. Ici se crée le volume macrocosmique à partir duquel nous travaillerons la notion de forme idéale dans notre univers microcosmique. L'expression symbolique de cette seconde séparation Terre - Ciel comprenant au milieu un vide matriciel se fait par la lettre hébraïque Beth et la lettre grecque Phi . Ces deux lettres instaurent un plancher et un plafond reliés et un espace matriciel central.
Beth est la première lettre de la Torah. Le signe a valeur numérique 2 est composé de deux pointes, l'une vers le haut désigne son créateur et le ciel, l'autre vers le bas désigne son Nom à valeur numérique 1 soit l'aleph qui est la lettre de l'Un, mis pour YHWH source unique du Principe.
3ème jour : « il a séparé la terre et les eaux ». Encore une fois tout est deux dans la manifestation de l'Unité. En bas, il repousse l'eau pour faire apparaître la terre sèche que les eaux d'en haut viendront féconder. Dans le monde d'en bas, on distingue le sec de l'humide. Le monde est alors conçu comme un plan à féconder. La séparation des éléments se fait en fonction de leur nature élémentaire, ce que l’on retrouve dans les épreuves initiatiques. La terre sèche sera alors notre plan d’exercice, plan « séparé » sur lequel on pourra tracer notre carré long, notre tableau de loge ou le Pavé Mosaïque. Le plan sera fécond de la lettre tracée au sol et de la graine plantée en terre.. la relation entre le Haut et le Bas est maintenue sur le plan issu du 3eme jour par une eau propice à la vie des jours suivants. La lettre hébraïque Gimel à valeur 3 représente un chameau porteur d'eau et la fertilité. La lettre Thêta représente cette séparation du plan et des eaux, Le Pavé mosaïque sera le plan d'exercice de l'ordonnancement vital.
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4ème jour : Il crée le Soleil et la Lune, le Soleil pour le jour, la Lune et les étoiles pour la nuit. La Loi des cycles est ainsi installée. Nous voilà avec les 3 cycles temporels : Solaire, Lunaire et Stellaire. On retrouve ici le Soleil et la Lune de la loge et du TDL, mais encore la voute étoilée : « le quatrième, il a créé les luminaires célestes, » en les séparant de la terre. Cette séparation du plan terrestre du plan céleste sera marquée par une frontière sur le TDL ce sera la corde à Nœuds avec 3 et parfois 12 Lacs d’amour. Cette séparation renvoie au symbolisme de la Terre le carré et l'équerre et du ciel cyclique le compas. Les corps célestes entament leur course circulaire dans le ciel et commencent à marquer le passage du temps, l’Orient pour le lever, l’Occident pour le couchant, le Septentrion et le Midi là où le soleil est à son plus haut. Le cycle temporel préfigure les heures de travail du Maçon et la Règle à 24 pouces. Désormais les 6 directions et 3 axes sont installés : c’est encore la croix tridimensionnelle, "structure absolue de la Loge" qui nous donnera la géométrie du cube, du microcosme et du macrocosme. L’apprenti imite les cycles par des circumambulations, en marchant à la rencontre de la LUMIÈRE.
Néanmoins on se souvient que le troisième jour l'eau fécondante intervient sur le plan séparé de la terre. Ici le soleil dans sa course viendra libérer le cycle de la vie des jours 5 et 6 suivants. Le soleil par ses plus bas levant et couchant et son plus haut midi, forme un triangle isocèle lumineux surplombant le carré de la terre. Le 4 du carré et du 4-ème jour se marie au 3 du Triangle solaire et eaux fécondantes du troisième jour. Tout est présent pour accueillir la vie, le 4 et le 3 sont désormais inséparables. D'ailleurs la langue hébraïque instaure une interdépendance entre le 3eme et 4eme jour, le guimel valeur 3 et le dalet, signifiant la porte de valeur 4 formant le delta grec. Le 4 et le 3 formeront le 7 du 7eme jour. Ce dalet serait peut-être la porte donnant accès à ce paradis perdu? Serait-ce la porte du TDL au sommet des trois marches, porte surmontée d'un fronton en triangle isocèle au REAA et de bien d'autres rites?
L'ésotérisme chrétien lié à la porte nous renvoie aux thématiques christiques suivantes:
Jn 1,9 "Je suis la porte. Si quelqu'un entre par moi, il sera sauvé; il entrera et il sortira, et il trouvera des pâturages."
Jean 14:6
Jésus lui dit: Je suis le chemin, la vérité, et la vie. Nul ne vient au Père que par moi.
Éphésiens 2:18
car par lui nous avons les uns et les autres accès auprès du Père, dans un même Esprit.
Hébreux 10:19-22
Ainsi donc, frères, puisque nous avons, au moyen du sang de Jésus, une libre entrée dans le sanctuaire… (trad Louis Second sur wp)
Schéma N°2 La croix tridimensionnelle, modèle et schème d’architecture sacrée, est établie à partir de la Parole Principielle des 4 premiers jours. Ceci est la clef "hermétique" du symbolisme maçonnique prônant un retour dans la Lumière. "Hermétique" car Hermès par son bâton ailé reliera la Terre au Ciel. Le X = le Plan d'exercice le I = L’axis Mundi équivalent du fil a plomb au dessus du TDL Le Centre de cette croix est insaisissable. C'est la source principielle de toutes manifestations où se produit la concentration première et d'où émane la Lumière. On le symbolise par le germe premier, un iod valeur 10 qui exprime la main du créateur et renvoie à l'aleph valeur 1. Cette main créatrice des origines sera conférée à "l'artisan créateur" désirant la forme parfaite, face à la pierre brute du TDL ou face à la glaise sur le tour du potier. |
5ème jour : « les poissons et les oiseaux » ici s’installent la vie son souffle et son cycle, c’est la cinquième grande séparation et le quatrième cycle de la genèse. Ici on valide la séparation du haut et du bas du 2eme jour en les rendant viables: les poissons pour les eaux d'en bas et les oiseaux pour le ciel.
Le cycle de la vie est représenté sur le TDL par la grenade au sommet de l’arbre colonne. La grenade appelle la multiplication du vivant et la transmission de la Connaissance en tant que graine du Fruit de l’axe reliant la Terre et le Ciel. La colonne unit le haut et le bas dans une reliance vitale (Voir la colonne du schéma N°3)
Le poisson symbolise le Christ dont la porte est installée le 4-ème jour. La porte symbolise l'entrée dans la structure qui va accueillir le souffle de la vie; La mandorle issue du 4 (les 4 vivants) et du 3 (montant et descendant), donnant un Christ en gloire.
Le souffle qui donne la vie est le Hé hébraïque valeur 5, ici donné 2 fois comme les deux mains agissantes du créateur pour le haut et le bas. C'est donc une geste créatrice de l'artisan à deux mains comme le maillet venant du haut à main droite et le ciseaux œuvrant en bas à main gauche. La valeur 5 nous rappelle les 5 doigts de chaque main en liaison Ciel-Terre.
6ème jour : « le sixième les animaux terrestres et l’homme ». L'acte de création de l’Adam non divisé est le point culminant de l’Heptaméron. Dieu invisible façonne la créature à son image ! Adam serait miroir du divin !
Donc le franc-maçon face, à l’image du TDL est face au miroir de la création et donc de lui-même (syllogisme). Conclusion : Le TDL, diminutif imagé de l’acte ontologique "reflète" une image "partielle" du Divin en nous.
Le cycle de vie commencé au 5eme Jour, passera au 6eme par la différenciation de l’Adam Premier en Adam et Eve complémentaires et leur descendance. Donc à l’intérieur même du TDL doit être introduite la triangulation par complémentarité de parties ayant la même origine. Ce TDL devrait permettre de remonter à l’Origine, avant la chute, vers cette fameuse Unité première des francs-maçons de tradition ou centre de l’Union pour les sociétaux.
Cependant la division en Deux sous entend une reliance ontologique des deux parties par un symbole. Ce sera une lettre qui relira les deux souffles, les deux Hé. Cette lettre est la 6eme de l'alphabet hébraïque, le wav qui signifie le crochet au bout d'un axe. Le crochet réuni les deux parties de l'Adam premier comme ses deux poumons (hé), c'est donc une colonne vertébrale qui uni le corps, l'âme et l'esprit dans un axe de progression. Cet axe de progression unificateur est bien présent en loge, c'est le pavé mosaïque pour le corps, le livre et le souffle de l'écriture pour l'âme et le triangle rayonnant ou flamboyant pour l'esprit. (Voir schéma N° 4 en fin d'article)
Une fois opérée cette séparation Homme-Femme couronnant les 5 jours de séparations préparatoires on passera à l'union féconde. Le fruit sera soit celui de l'Unité retrouvée en esprit, expression d'un "microthéos", soit celui de la multiplication dans la matière expression d'un "microcosmos". On pose une alternative: soit le chemin de la parole soit le chemin du multiple.
La symbolique maçonnique tente la représentation ces deux chemins réunis dans un même axe par un hexagramme pentalphique, représentant un microcosme au centre d'un macrocosme (Jules Boucher "La symbolique maçonnique"). Une autre représentation est possible par un hexagramme centré d'un G (Rite Ecossais Primitif -1er et 2em grade - Robert Ambelain ). A cet instant on peut dire que le divin aurait séparé pour unir et multiplier les qualités et non les quantités.
7ème jour : Dieu s’est reposé et a contemplé son œuvre ». Ayant accompli sa tâche, Dieu se repose dans toute sa gloire et contemple son œuvre. Elle est qualifiée de "très bonne". Il devrait alors se retirer laissant l'homme façonné à son image "œuvrer". Le tableau de l’univers est devenu "complet" dans l’espace et dans le temps; mais il semblerait qu'il jette un dernier coup d'œil sur son TDL.
Cette contemplation divine du 7eme jour est figurée par un œil* dans un triangle lumineux. De son centre flamboie la Lumière ontologique.
*Que regarde cet œil au juste ? Le TDL bien sûr qui est une image symbolique de sa création (macrocosmique), mais aussi le franc-maçon qui incorpore l’image symbolique du TDL en lui. N'oublions pas que le franc-maçon est dans la descendance "mythique" de l'Adam premier, et donc façonné à l'origine à l'image du divin…Mais il est aussi issu de cette chute du Chapitre 3 de la Genèse.
Cet œil insistant traduirait il un doute sur notre capacité à remonter dans l'axe?
Ci dessous les 4 systèmes symboliques permettant la remontée dans l'axe dans le TDL.
Schéma N°3 : Les trois clefs de lecture de la Genèse (matière/âme/esprit) pour les trois plans de lecture superposés du Tableau de loge, corps-âme-esprit, ou matière transformée, verbalisation de la reliance, vision, sont dotées du même ternaire axial, auquel s’associe l’élan vital et cycle de la vie.
LES 4 MIROIRS ANABATIQUES DU TABLEAU DE LOGE
II / L’Adam Premier - Comment Un devient Deux.
Dans la seconde partie de cet acte créateur (Gen 2:4 à 2:25) la Genèse se focalise davantage sur l'homme sa différenciation et son acte transgressif qui provoqua sa chute dans la matière . Voyons l’état édénique : Dieu forme l’Adam Primordial à partir de poussière (Genèse 2 v 7). Dieu le place dans le Jardin d'Éden afin qu'il « le cultive et le garde » (Gen 2. 15). Il a toutes les potentialités (hypostases ou séphiroths) de Dieu, car il est à son Image (encore un miroir!).
Regardons nos rituels : comment le futur apprenti entre en loge ? Comment l’acte initiatique réforme l’impétrant ? il est en état de nature originelle « ni nu ni vêtu » ayant par ailleurs abandonné ses métaux. C’est un état de pureté ! N’y a-t-il pas ici un désir des rédacteurs des rituels de revenir à un état de nature primordiale ? La peau d’agneau de nos tabliers est aussi un signe de sacrifice et d’innocence.
Estimant qu'il n'est pas bon qu'Adam soit seul (Gen 2. 18) il le subdivise : Dans Gen 2. 20 Nommer fait exister ! Adam donne un nom à chaque animal, mais ne trouve pas d'aide semblable à lui. Dieu le plonge alors dans un profond sommeil, et lui prend une côte (ou son côté) qu'Il façonne en femme. C’est un dédoublement mâle et femelle à partir d’une Unité originale androgyne.
Le TDL intègre cette différenciation par dédoublement des Colonnes, du Soleil par la Lune de la case noire par une case blanche[1]. Dans tous les cas de dédoublement, il sera recherché par le franc-maçon la coïncidence des oppositions. C’est une triangulation de sagesse qui permettra de retrouver à partir de deux opposées le gout de l’Unité fondatrice par la complémentarité. L’initiation et le TDL prônent le retour à l’unité lumineuse .
[1] Les « oppositions complémentaires » apparaissent dans la Genèse par la Parole autocréatrice qui sépare du chaos: le haut et le bas, la terre et l’eau, la Lune et Soleil. Les francs-maçons complètent ces séparations nées de la "manifestation" par des oppositions fonctionnelles: les deux colonnes, le noir et le blanc du pavé, l’équerre et le compas, le niveau et la perpendiculaire, la corde partie lisse et partie nœuds, le maillet qui frappe et le ciseau qui taille, etc. L’idée est de résoudre les coïncidentia oppositorum en un principe originel ou une unité première "adamique" et donc de revenir au Paradis perdu. On réassemble les oppositions apparentes dans une orthopraxie verticalisante et élévatrice en souvenir du 6eme jour.
III : De la chute et du Devoir
L’Adam subdivisé peut manger tous les fruits de l’EDEN, à l'exception du fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal, sous peine de mort, c’est l’interdit en forme de Règle comportementale ou de Devoir (ou de Landmark). En matière initiatique tout interdit appelle une transgression[1] dont les rituels sont témoins dans d’autres grades…Ici est instauré la Règle, le Devoir, l’autorité surplombante, la hiérarchie.
C’est le Serpent véritable un tiers en regard de la relation triangulaire primordiale qui associé au fruit de la Connaissance du Bien et du Mal provoque l’éloignement de la Parole et de l'ordonnancement du Père. Cette tierce parole entraine le dédoublement humain de la parole, sa désacralisation et la chute dans la matérialité. Revenir dans l'axe de la Parole originelle après ce "pas de coté" sera difficile.
Le dialogue de l’Homme et de la Femme est orphelin de la Parole du Père. Les francs-maçons vont tenter de la rétablir la triangulation primordiale par l’épellation, ou par l’invocation comme une pseudo prière.
Dans l’épellation B.O.A.Z au REAA (ou J.A.K.I.N au REP) nous avons à chaque fois un Silence interlettré entre deux lettres (qui est de même nature que le « Point » que nous avons entre chaque lettre de V.I.T.R.I.O.L). Ce silence représente le divin et sa « Présence » qui brille par son absence. Ce n’est donc plus un "dialogue" d’épellation, c’est un trilogue avec l’Axis Mundi sans le serpent, car la 1ere lettre épelée est adossée à la colonne du silence de l'apprenti, à la colonne axiale, à la colonne arbre, à la colonne connaissance. (Retour dans l’axis Mundi)
Enfin le TDL nous montre une autre triangulation axiale de la Parole : les deux colonnes inscrites de leurs lettres B et J vont à leur tour entrer dans un trilogue avec le « Livre des Écritures » surmonté de l’Équerre contenant l’action transformatrice dans la matière et du Compas représentant l’étendue de la Connaissance par l’esprit à partir du Point originel, de la Parole autocréatrice, du fiat lux...
C'est ici que les deux colonnes représentant la porte du retour vers l'Eden (4). Les deux colonnes vont s'associer au triangle (3) montant vers l'Ecriture "traçant" par les pas, un retour vers la Parole.
[1] Ici c’est la Prévarication (la concussion) par le Serpent de l’Adam du dia-logue. Un logos dévalorisé s'installe durablement. Un autre état d’être soumis au temps, à la finitude et à la contingence rompt avec l'état primordial. La main créatrice de l'homme conçue comme un don démiurgique, s'égare dans une matérialité sans "essence"..
IV / De la chute à la remontée AXIALE : les 4 miroirs pour un chemin de Lumière.
Recette psychodynamique du retour se fait par une geste initiatique[1] associée à une lecture axiale des 4 sous-ensembles du TDL (Schéma 3). Cette lecture ne peut se faire sans le message de fraternité et d’amour d’une chaine d’Union. Il s’agit de suivre le chemin de l’incarnation de la Lumière.
1/ Le 1er travail est l’incorporation à soi du symbole en général et de l’Imago Mundi en particulier : la loge séparée du monde profane par l’enceinte, la porte et la frontière céleste de la corde à nœuds, est bien dotée d’une reliance axiale architecturée (les 2 colonnes, les 3 marches). Le dispositif architecturé du Temple « séparé » devient image de Soi ou Temple intérieur séparé du chaos ou du tumulte profane. (Image N°1 ci dessous)
2/ Le 2nd travail de transformation sur la pierre brute, qui est l’image en miroir de mon état. La forme parfaite du cube est dictée par la reconnaissance de la pierre cachée en soi via la perpendiculaire ou fil à plomb. (triangulation Pierre brute – maillet – ciseau -fil à plomb - niveau).(Image N°2). La Pierre se taille autant de l'extérieure que de l'intérieur...
3/ Le 3ème travail d’épellation à deux et l’apprentissage d'un langage sacré en essence (c'est-à-dire au-delà du sens, non-sens, contresens). Il s’agit de passer de la lecture sacrée épelante (B et J) aux Écritures sacrées et noms divins. (Image N° 3). Il s'agit donc d'une triangulation de l’Écriture sacrée (la Parole perdue) par l’épellation.
4/ Le 4ème travail de marche lumineuse vers la Lumière originelle. Cette marche emporte la LUMIÈRE ontologique née de la Parole qui donne naissance aux astes, aux cycles et à la vie (cycle solaire, lunaire, stellaire, vital). Cette marche nous permet d’intégrer un grand tout résumé dans le triangle rayonnant centre de l’œil du GADLU ! Par 3 pas dans l’axe de la Lumière orientale valant l'état corporel pour le premier pas (pavé mosaïque du plan d’exercice), l’État d’Âme pour le second (lecture cardiaque, réceptacle des écritures), l’État d’Esprit pour le troisième (Lecture illuminée du Réel). (Image N°4)
5/ Le 5ème travail de germination par les cycles - élan vital (Image 5) Vie, mort et renaissances, tout le symbolisme de la grenade !
Pour conclure, attardons nous sur le 2nd travail :
La Pierre brute est un miroir de soi, un miroir microcosmique. La taille de la pierre met en jeu un système symbolique agissant par une double triangulation qui seule permet d’atteindre la connaissance en soi par la réalisation du passage Jungien du Moi au Soi. La première triangulation passe par 1/ la pensée illuminée du souvenir de l’Eden, 2/ la volonté de retour par le maillet et 3/ l’action réparatrice par le ciseau. Le miroir est une triangulation, une réalisation dans la matière par la taille d’une forme parfaite : c’est la réalisation de Soi dans un cadre fraternel dans un but de perfection permettant une reliance à plus haut. Cette pierre n’est pas seule, elle doit s’intégrer dans une architecture sacrée qui célèbre une Lumière incarnée. Chacun devient alors une pierre vivante assemblée pour un Temple à la Lumière.
Page suivante: l'inventaire des triangulations axiale du Tableau de loge de base REAA étudié. Il en existe d'autres suivant le rite étudié.
E:.R:. R:.L:. "La Lumière Ecossaise" Ollioules
Remerciements à J:.L:.M:. et aux FF:. et SS:. de la R:.L:. Lumière et Bienveillance de la GLEFU pour leur accueil.
Nous accueillons nos FF et SS visiteurs à Hyères (83) les 2ème mercredi du mois et à Ollioules (83) les 4ème Lundi . GLSREP. Vous pouvez nous écrire en réponse à l'article.
Article en construction, nous acceptons vos suggestions.
[1] Après un testament introspectif face aux trois règnes, face à lui, à ses semblables et face au Divin, l’impétrant procède franchissement de la Porte pour aller vers la LUMIÈRE dans l’état Adamique "ni nu ni vêtu", débarrassé de tous métaux. Il passe entre deux colonnes qui sont porteuses de grenades symbole du multiple, de l’élan vital cyclique et de la connaissance. Ces deux colonnes sont des arbres: l’arbre de Vie et l’arbre de la Connaissance au fruit défendu. La recomposition élémentaire par les épreuves des voyages dans la terre, la mer, le ciel et le feu, la première présentation d’un miroir à connotation comportementale et morale, sont des prémices d'une reconstitution adamique. Enfin, la levée du bandeau débouche sur une autre dimension du réel : illumination intérieure pour certains, ou conscience éclairée pour d'autres.